être à l'écoute

Poétique de l’infra-verbal

Jeff Barda (GB) est Senior Lecturer en études françaises à l’université de Manchester. Il est l’auteur de Experimentation and the Lyric, ainsi que de nombreux articles sur la poésie sonore, visuelle et intermédiale.

Vider les mots, démilitariser le langage, performer
John Cage, dans son œuvre emblématique Empty words, conçoit le projet de faire éprouver, en une sorte de maïeutique utopique, le passage du langage à la musique. Où s'arrête le sens, où commence le son, qui précède, qui suit? Cette œuvre condense à sa manière une problématique à la fois esthétique et anthropologique à laquelle d'autres artistes, chercheuses et chercheurs s'attachent également. Il s'agira dans cette présentation d'en tracer le contour.

Vincent Barras (CH) a reçu une formation littéraire, musicale et médicale à Genève, Paris, Londres, et enseigné à l'Université de Lausanne (histoire de la médecine et des sciences), ainsi qu'à la HEAD-Genève (son). Il poursuit une activité de recherche sur l'histoire du corps, de la médecine et des sciences, la musique, la poésie, et les arts contemporains, et développe simultanément un travail de création sonore, d'écriture et de traduction, de poésie sonore et de performance.
Il réalise des installations, concerts, créations dans divers lieux en Suisse, Europe, Amérique du Nord et du Sud, en solo ou avec des chorégraphes, musiciennes et musiciens, danseureuses, autrices et auteurs, plasticiennes et plasticiens.

L'oralité performée ou Quand les mots entrent dans l'espace de l'entre deux, l'espace de la liminalité
Heike Fiedler évoque les réalités multiples de l'oralité et propose d'observer les possibilités de transformations et changements qui sont réalisables lors du passage de l'intérieur (corps parlant) vers l'extérieur (espace de la réception).
C'est dans ces moments-là que les artistes explorent la perméabilité des concepts apparemment figés et/ou s'emparent de l'oscillation entre le mot et le son, le texte et la partition, par exemple.

Heike Fiedler (D/CH) est auteure, poétesse, artiste visuelle et sonore. Elle performe ces textes depuis une vingtaine d’années à voix nue et en mode électroacoustique aux festivals de poésie dans le monde entier, en français, en allemand et entre les langues. Elle a signé sept livres et de multiples publications dans des revues et anthologies.

Listening to machines: A speech processing perspective

Philip N. Garner (CH) a obtenu un master en génie électronique à l'université de Southampton, au Royaume-Uni, en 1991, puis un doctorat (par publication) à l'université d'East Anglia, au Royaume-Uni, en 2012.
Il a d'abord rejoint le Royal Signals and Radar Establishment à Malvern, dans le Worcestershire, où il a travaillé sur la reconnaissance de formes, puis sur le traitement de la parole. En 1998, il a rejoint le Canon Research Centre Europe à Guildford, dans le Surrey, où il a conçu des métadonnées de reconnaissance vocale pour la recherche. En 2001, il a été détaché (puis transféré) au groupe de recherche sur la parole de Canon Inc. à Tokyo, au Japon, pour travailler sur les aspects multilingues de la reconnaissance vocale et la robustesse au bruit.
Depuis avril 2007, il est chercheur scientifique senior à l'Idiap Research Institute, à Martigny, en Suisse, où il continue à travailler dans la recherche et le développement de la reconnaissance vocale, de la synthèse et du traitement du signal.
Il est membre senior de l'Institute of Electrical and Electronics Engineers (IEEE) et a publié à l'échelle internationale dans des actes de conférences, des brevets, des revues et des livres. Il a également été rédacteur en chef adjoint de la norme ISO/IEC 15938-4 (MPEG-7 Audio). Il fait actuellement partie du comité de rédaction de Speech Communication et a précédemment occupé les fonctions de rédacteur en chef adjoint et de rédacteur en chef senior pour Signal Processing Letters.

Noise: écouter notre environnement sonore à distance
Le projet Noise d'Analema Group, permet à une audience d'écouter une variété d'environnements sonores à distance et de naviguer au travers de plusieurs environnements sonores, générés en temps réel. Initialement développé à Londres sous la forme d'une installation sonore à la Tate Modern, le projet a évolué au fil du temps en carte sonore interactive.

Titulaire d'un doctorat en ingénierie des arts numériques et fort de 15 ans d'expérience professionnelle dans les industries créatives en tant que directeur artistique, Olive concentre sa pratique sur la projection holographique, l'animation en temps réel et l'art participatif. En tant que coordinateur d’un projet de recherche de l'AHRC sur les arts médiatiques participatifs et leurs effets sur les liens sociaux et la santé publique, le Dr Oliver Gingrich (GB) explore les liens entre les pratiques de co-création, l'art et le bien-être (participateresearch.co.uk).
Directeur d'Art in Flux, Olive soutient les groupes d'artistes sous-représentés dans les arts numériques. En tant que professeur associé, à l'Université de Greenwich, Olive enseigne et mène des recherches au département de design et des industries créatives de l'Université de Greenwich.

Tasteful Turntable
La conférence de Lars et Nikolaj Kynde porte sur leur installation performative, Tasteful Turntable, qui explore l'interaction entre les sens du goût et de l'ouïe. Une table à manger spécialement conçue, qui tourne lentement, offre aux invités des stimuli parallèles par le biais de leurs oreilles et de leur bouche. Grâce à des recherches interdisciplinaires approfondies, ils ont mis au point un langage d'expression artistique cross-modal pour cette œuvre.

Les compositeurs d'aujourd'hui assument plusieurs rôles en plus de celui de compositeur, qu'il s'agisse de gestionnaires, d'organisateurs de concerts, de promoteurs ou d'interprètes. C'est particulièrement le cas de Lars Kynde (NL), dont l'esthétique nécessite le recours à un éventail extrêmement large de disciplines: conception, fabrication, composition, mise en scène, direction, interprétation. Lars évolue dans un domaine interdisciplinaire entre la musique contemporaine, le théâtre abstrait, l'art conceptuel et la recherche sur les instruments de musique, souvent en collaboration avec des experts dans des domaines connexes.

Nikolaj Kynde (DK) est compositeur, ingénieur logiciel et artiste sonore. Tout au long de sa carrière, il a travaillé avec le son dans le domaine des installations, du matériel informatique et de la composition musicale. L'interaction entre les sens a toujours été une notion centrale dans ses œuvres. Fort d'une formation en composition et en ingénierie et de plusieurs années d'expérience dans l'industrie, il travaille dans les domaines du son, de la musique et de l'informatique.

Mâchoire Académie / How to bite
Anne Le Troter s’appuiera sur les récits de cinq professionnelles et professionnels pratiquant l'art de la morsure pour aller vers une pédagogie de la mâchoire. Dans une conférence de 30 minutes, on mordra comme Hieronymus Capivacci, médecin au XVI° siècle qui proposait à sa patientèle de croquer dans les cordes d'une cithare pour évaluer le taux de surdité d'une patiente ou d'un patient. On mordra avec érotisme, comme Jimi Hendrix mordait sa guitare. On mordra comme Carmilla, vampire lesbienne et inspiratrice de Dracula. On mordra la main pour qu'elle nous lâche, on mordra le pied pour qu'il fasse demi-tour et on mordra la langue pour qu'elle se retire. Avec Angelique Merasty nous reviendrons sur l’enseignement donné par nos mères en commençant par étudier la façon dont la sienne, descendante de la Première Nation des Cris des bois du Nord-Est de la Saskatchewan, lui a appris l'art du mordillement. Toutes et tous nous enseigneront l'art de mordre sur chevalet tout en nous racontant comment attaquer et se défendre. Au long de ce parcours nous reviendrons sur l'installation d’Anne Le Troter à la biennale Son 2025 proposant des formes d'écoute consenties, des sculptures à mordre et de la poésie à avaler.

Vox O xoV
Les projets de Violaine Lochu naissent de rencontres, provoquées ou fortuites, avec des entités de tout ordre – humaines, animales, végétales, minérales… Lors de longues phases d'immersion, elle collecte des éléments sonores, narratifs et visuels propres aux milieux dans lesquels elle se plonge. A partir de ce corpus, elle crée par collage, recomposition, transposition, traduction, réinvention, des performances et des installations dans lesquelles interagissent sons, vidéos et dessins.
Lors de son intervention, Violaine Lochu présentera les différentes manières dont la notion d'oralité peut être traitée dans ses performances, que ce soit en reprenant par le prisme de sa propre voix des propos qui lui sont confiés (Animal Mimesis, 2015);
en s'hybridant vocalement avec un Autre (Hybird, 2018);
ou en composant à partir de données issues de la tradition orale pour des ensembles vocaux (Pharmakon / Reboot, 2025).

La pratique de Violaine Lochu (FR et BJ), au croisement de l’art contemporain, de la musique expérimentale et de la poésie sonore, est une réflexion sur la notion de métamorphose: vocale, physique, spirituelle, linguistique et intime.
Lauréate du prix Aware 2018 et du prix de la performance 2017 du Salon de la Jeune Création, nominée au prix de littérature Bernard Heidsieck 2019 et à celui du Salon du dessin Drawing Now 2025, Violaine Lochu a exposé et performé dans de nombreux lieux en France – Centre Pompidou, Palais de Tokyo, Jeu de Paume, Mac Lyon... – en Europe – Biennale de Venise, Festival Performative au MAXXI (Italie), festival Playground (Belgique), festival Ars Poetica (Slovaquie), galerie Quadrum (Portugal), Centre d’Art Contemporain de Genève (Suisse), ... - ou sur d'autres continents - Le Centre (Bénin), Théâtre du 4e art (Tunisie), Institut français de Hô Chi Minh-ville (Vietnam), Musée d'art de Joliette (Canada), ...

IA en scène, interagir avec l'IA dans les musiques improvisées
Gilbert Nouno explore la thématique de l'IA dans la musique à travers ses recherches artistiques et ses projets en cours. Il y dévoile comment l'intelligence artificielle peut devenir partenaire d'improvisation, miroir ou contrepoint créatif, en révélant autant ses forces que ses failles. Alternant démonstrations sonores et visuelles, extraits de performances et expérimentations en live, il met en lumière une approche poétique et critique des interactions homme–machine. Le public est invité à écouter, observer et interroger ces dialogues improbables entre technologie et création artistique.

Gilbert Nouno (CH) compose, code, improvise, enseigne à la Haute école de musique de Genève. Il aime mêler les sons aux images, et la technologie aux gestes de la scène. Entre matière tangible et matériau dématérialisé, ses œuvres hybrides invitent à franchir la frontière, toujours mouvante, entre humain et machine. Avec l'intelligence artificielle, il cherche de nouveaux terrains de jeu à l'improvisation, à la performance et aux pratiques artistiques augmentées. Au fil de son parcours, il a partagé la scène et l'atelier avec Pierre Boulez, Daniel Barenboim, Jonathan Harvey, Olga Neuwirth, le saxophoniste Steve Coleman, Jean Kalman et le metteur en scène Pierre Audi.

A l'écoute des machines: repenser l'écoute du patrimoine industriel
Ce projet propose des méthodes expérimentales pour la capture et la préservation du patrimoine auditif des machines et installations industrielles, ainsi que pour la préservation des compétences auditives en voie de disparition des opérateurs. Les machines industrielles et leurs infrastructures environnantes constituent une topologie unique du paysage sonore. Culturellement, les machines sont les témoins d'un patrimoine riche et complexe, capable de raconter l'histoire de cette région. Elles fournissent des empreintes sonores uniques et façonnent le paysage sonore environnant en fournissant «le son du lieu» (Augoyard, 2005).

Alain Renaud (CH) est designer sonore. Il a commencé sa carrière dans la production musicale aux Etats-Unis avant de déménager à Londres en 2001. Il est titulaire d’un doctorat dans la performance de musique en réseau (SARC, Queen's Belfast). Il est membre du collectif londonien Analema Group (Tate Modern, National Gallery) et travaille sur des projets artistiques et commerciaux dans des domaines tels que la sonification d’espaces, l'AR, la VR et l’audio immersif. Son travail est visible dans plusieurs publications comme Leonardo (MIT Press), AES et NIME. En 2020, Alain a rejoint l'EDHEA à Sierre ou il enseigne des sujets liés à l'art sonore et participe a des projets de recherches indisciplinaires dans le son et l'interactivité.

(Senior Fellow, Orpheus Instituut for Advanced Studies and Research in Music)

The Sounds Delicious Project
Avez-vous déjà écouté ce que vous mangez?
Sounds Delicious est un projet de recherche-création qui étudie les rôles du son et de l'écoute dans nos cultures culinaires. Quels récits alternatifs sont révélés en portant une attention au sonore? C'est en travaillant avec des artistes, des cheffes et chefs, des chercheuses et des chercheurs que le projet s'est chargé – via plusieurs approches (sensorielles, artistiques, scientifiques) – de différents modes d'écoute, tous liés à notre production alimentaire sous le prisme de nos relations humaines et non-humaines.
La recherche commence par l'acte de cuisiner ou de faire du terrain ensemble, avec les personnes intéressées. A partir de ces actes collectifs sont créés des dispositifs d'observation et sont imaginées des œuvres visant à repenser nos relations au vivant. Le 27 septembre, Melissa Van Drie montrera des exemples de ce qu'elle a mené avec les étudiantes et étudiants des écoles d'art au Danemark et en France.

Melissa Van Drie (DK) est historienne culturelle et artiste, spécialisée dans l'histoire du son et de l'écoute. Diplômée en études théâtrales et musicologie, ses recherches interdisciplinaires se situent à l'intersection de la performance, de la culture matérielle et de l'histoire de la science. Elle travaille sur les pratiques corporelles et sensorielles, ainsi que l’histoire de l’expérimentation dans la production du savoir. Elle a tenu des postes de recherche et de la création artistique à Cambridge, à la Sorbonne et à l'Université de Copenhague. Elle est actuellement chercheuse à l’Orpheus Instituut pour les études et les recherches avancées de la musique à Gand.